Les XVIII et XIX siècles : la comète
Au XVIII siècle, la comète la plus spectaculaire fut la comète Cheseaux, du nom de l’astronome suisse qui, sans l’avoir découverte, l’étudia de la façon la plus approfondie. Cette apparition, absolument unique et saisissante, n’a pas d’équivalent dans l’histoire des observations célestes. Dès le 1er février 1744, elle était plus lumineuse que Sirius (magnitude -1,4); le 18 lévrier, elle brillait comme Vénus et présentait deux queues, l’une longue de 7°, l’autre de 25°. Les 7 et 8 mars, alors que la queue disparaissait à l’horizon, Cheseaux assista à un spectacle fantasmagorique : une queue multiple, divisée en six branches, jaillit comme une fontaine à l’horizon. L’astre devint une daylight, une comète visible en plein jour. Le 8 août 1769, le grand Charles Messier, le «Furet des comètes», comme l’appelait le roi Louis XV, identifia la seule de ses treize comètes qui mérite le nom de grande comète. Cet astre de magnitude 0 développa une queue de presque 100° et resta visible pendant 100 jours à l’œil nu.
En 1811 apparut un astre dont l’influence, dit-on, détermina une vendange extraordinaire : pendant des années, les vins mis en bouteilles cette année-là furent tenus pour les plus délicats, et aujourd’hui encore, l’année 1811 reste, pour les œnologues et les connaisseurs, «l’an¬née de la comète». L’astre ne passa pas particulièrement près de la Terre et du Soleil (son périhélie fut même extérieur à l’orbite terrestre), mais, doté d’une forte luminosité intrinsèque (due probablement à un noyau de dimensions inhabituelles), il atteignit malgré tout la magnitude 0 et resta même visible à l’œil nu pendant 260 jours, un record qui ne fut battu qu’en 1997 par la comète Hale-Bopp.
À la fin du mois de février 1843, une comète très lumineuse fut visible en plein jour en Nouvelle-Angleterre, à 1° du Soleil. Elle frôla la surface de notre étoile, en passant à 120 000 km de distance, ce qui lui valut une magnitude apparente de -17, équivalant à 50 fois la luminosité de la pleine lune. Au début du mois de mars, elle fut visible le soir : très dense et lumineuse, sa queue atteignit presque 70° de longueur, alors que sa tête brillait comme Jupiter.
Les dimensions réelles de la queue furent de 320 millions de km! La comète apparut l’année même pour laquelle un certain William Miller avait prévu la fin du monde. La coïncidence réveilla des peurs ancestrales, qui disparurent avec les disciples de Miller dès le 3 avril 1843, la date prévue de l’Apocalypse. En 1858 apparut la plus belle comète jamais vue de mémoire d’homme : découverte par l’astronome italien Giovanni Battista Donati, elle présenta une queue de poussières, large et incurvée, et une queue de gaz, d’abord unique puis divisée en deux branches extrêmement fines. La queue, qui atteignait une longueur de 60°, fut sujette à des transformations très rapides, qui rappellent de près les modifications subies par la comète Hyakutake de 1996 : sa longueur passa de 35° à 50° en une journée et fut réduite de 45° à 15° en trois jours seulement. La chevelure offrit un autre spectacle : observée au télescope, elle présentait la forme d’une girouette, composée de multiples jets, et changeait continuellement d’aspect d’une nuit à l’autre. La comète Donati fut la première comète qui fut photographiée : c’est un photographe anglais, et non un astronome, qui réussit à fixer son image avec un simple objectif utilisé pour les portraits. Néanmoins, seule la partie la plus brillante de la chevelure et de la queue était visible sur le cliché.
En 1861, une comète passa à moins de 2.0 millions de km de la Terre. Sa proximité produisit un énorme allongement apparent de sa queue, qui s’étendait sur 118°, de l’étoile Beta Aurigæ jusqu’à la constellation de l’Ophiucus. Ce fut la plus longue comète des temps modernes, même si la longueur réelle de la queue était très modeste : 50 millions de km. L’astre avait été aperçu pour la première fois dans l’hémisphère austral, mais la nouvelle de sa découverte n’était pas encore parvenue en Europe quand il apparut dans le ciel d’un matin de fin juin. Il était si grand qu’un des premiers observateurs, ignorant sa nature, pensa qu’il s’agissait de la Lune! L’année suivante, on vil passer la seule comète périodique, avec la comète de Halley, susceptible de mériter le nom de grande comète : la comète Swift-Tuttle. L’astre, dont les poussières sont à l’origine de la célèbre pluie d’étoiles filantes du 11 août (les «larmes de saint Laurent»), fut un objet de taille modeste, mais développa une queue de 30° jusqu’à la fin du mois d’août 1862. D’honorables dimensions, en fin de compte, si l’on songe que, lors du retour de la comète en 1992 (sa période est de 130 ans), elle fut à peine visible à l’œil nu et présenta une queue de 2° qui n’était visible qu’au télescope !
En 1882 apparut la comète qui développa la plus longue queue réelle de l’histoire. Connue sous le nom de «Grande Comète de septembre», elle fut découverte en Nouvelle-Zélande le 2 septembre 1882. Il s’agissait d’une sungrazer : le 16 septembre, elle fut visible au télescope durant toute la journée depuis le cap de Bonne-Espérance ; le lendemain, quand elle devait passer au périhélie, on la vit s’approcher du Soleil et disparaître aussitôt, premier signe indiscutable de la petitesse des noyaux cométaires et de l’extrême raréfaction des chevelures et des queues. Elle passa à seulement 430000 km de la surface solaire. Visible à l’œil nu en plein jour jusqu’au 20 septembre, elle devint tous les jours 10 fois plus brillante pour atteindre une magnitude de -18. Au matin, son éclat diminua, alors que se formait une superbe queue, large et incurvée, et, le 21 novembre, elle atteignit sa dimension maximale : quelque 600 millions de km. Alors que la tête de la comète était située sur l’orbite de Mars, l’extrémité de la queue atteignait celle de Jupiter ! Mais la perspective défavorable et son éloignement en réduisirent la longueur apparente à 30°. On vit aussi le noyau se briser en quatre parties.
Vidéo : Les XVIII et XIX siècles : la comète
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