EL NINO DE 1997-1998 VU PAR TOPEX-POSÉIDON
El Nino est un réchauffement du Pacifique tropical qui survient tous les quatre à cinq ans et qui dure entre 12 et 18 mois. La circulation océanique en milieu tropical s’ajuste rapidement aux fluctuations des alizés. Ces vents, qui en régime normal soufflent d’Est en Ouest, entraînent les masses d’eau de surface vers la partie Ouest du Pacifique équatorial, créant une accumulation d’eau chaude et un bombement de la surface de la mer dans la partie Ouest du bassin. C’est ce que l’on observe sur la carte des hauteurs d’eau, mesurées par Topex-Poséidon en février 2000. Chaque année, en décembre- janvier, les alizés faiblissent, causant un renversement de la tendance et un étalement des eaux chaudes vers le centre Pacifique tropical. Certaines années, l’affaiblissement des alizés est si fort que le courant transportant les eaux chaudes d’Ouest en Est peut traverser tout l’océan Pacifique en quelques semaines, créant cette fois une accumulation d’eaux chaudes dans la partie Est du bassin, particulièrement marquée le long des côtes de l’Amérique centrale, de Colombie et du Pérou. Ce phénomène est appelé «El Nino» (l’enfant en espagnol, en référence à l’enfant Jésus, car il survient à l’époque de Noël). En 1997, un événement El Nino particulièrement intense est apparu: dès mars 1997, le satelliteTopex-Poséidon a observé la naissance du phénomène, jusqu’à son paroxysme en décembre 1997, où l’anomalie de la hauteur de la mer dans le Pacifique tropical Est a atteint la valeur record de 30 centimètres. Ce n’est que vers le début 1998 que Topex-Poséidon a commencé à observer le déclin de l’événement El Nino et l’apparition de la Nina, phénomène qui survient généralement après El Nino. La Nina se caractérise par une reprise d’une remontée d’eaux froides le long des côtes Ouest de l’Amérique du Sud. Le phénomène El Nino provoque des transferts d’énergie thermique considérables entre l’océan et l’atmosphère, causant des anomalies climatiques de grande envergure et de grande intensité : sécheresse intense dans le Pacifique Ouest et particulièrement sur l’Indonésie, la Nouvelle-Guinée, le Nord de l’Australie, ainsi que précipitations catastrophiques et cyclones dévastateurs sur toute la bordure Ouest du continent américain. Les répercussions climatiques de El Nino affectent la planète tout entière par le biais de «téléconnexions atmosphériques». L’événement El Nino de 1997-1998 est considéré comme le plus intense jamais répertorié. Alors que celui des années 1982-1983 avait été qualifié de El Nino du siècle, le dernier événement a battu tous les records en termes d’anomalie thermique de l’océan, de précipitations à l’Est, de sécheresse à l’Ouest. Pour l’instant, rien ne permet de dire s’il y a un lien entre l’intensité du dernier El Nino et le réchauffement global, mais les spécialistes se posent la question.
En régime normal (1), les alizés poussent les eaux de surface du Pacifique vers l’Australie et les Philippines, créant un bombement de la surface de la mer et une zone d’eaux chaudes. L’évaporation sur cette région est intense tout comme les précipitations. À l’Est du bassin, les eaux de surface sont alimentées par des eaux profondes froides, riches en nutriments, et donc très poissonneuses. La thermocline (la couche limite entre les eaux chaudes de surface et les eaux froides profondes) s’enfonce à l’Ouest du bassin.
Lorsque El Nino se déclenche (2), les alizés faiblissent. Les eaux chaudes concentrées près de l’Australie ont tendance à s’étaler vers l’Est le long de l’équateur. Les systèmes de convection atmosphérique se déplacent vers l’Est. Des précipitations intenses accompagnées d’inondations affectent les régions côtières de l’Ouest de l’Amérique du Sud. La thermocline s’enfonce à l’Est du bassin, repoussant vers les profondeurs les eaux froides. Le réchauffement des eaux de surface affecte sérieusement les écosystèmes marins, en réduisant de
façon importante les stocks de poissons. La thermocline est beaucoup plus horizontale sur l’ensemble du Pacifique tropical qu’en régime normal.
Lorsque El Nino arrive en fin de vie (3), les alizés se renforcent, réchauffant le Pacifique Ouest et refroidissant le Pacifique Est. Un climat froid et sec affecte les côtes Sud-américaines. Les systèmes de convection atmosphérique sont confinés dans la partie Ouest du bassin. Les pluies sont abondantes en Indonésie. Cette phase de refroidissement est appelée La Nina.