LA DETECTION DES FILMS DE MATIERE ORGANIQUE SUR LES OCÉANS
sur cette image du satellite envisat, acquise à l’Ouest de la côte espagnole de Galice, les traces noires correspondent aux nappes de pétrole échappées des cuves du pétrolier Prestige, coulé au large. L’image montre avec précision l’itinéraire suivi par la pollution, qui dépend des vents et des courants. L’avantage du satellite est de pouvoir montrer d’un seul coup une grande étendue. En revanche, du fait des contraintes de la mécanique orbitale, il n’est pas capable de reproduire cette mesure très fréquemment, même si, comme envisat, il peut changer l’angle de prise de vue de son antenne. C’est pourquoi les responsables opérationnels de la lutte contre ces pollutions utilisent des avions radar dont la mesure est basée sur les mêmes principes et couvre des zones instantanées plus petites, mais qui sont beaucoup plus flexibles d’emploi.
On peut détecter les films de matière organique sur les océans. Sur une surface essentiellement plane comme celle des océans, l’intensité d’une image radar est surtout contrôlée par la rugosité, c’est-à-dire par le microrelief causé par les petites vagues, également responsable du scintillement au Soleil. Pour pouvoir séparer des points selon leur distance, un radar doit viser le sol latéralement (voirpage 22). Dans ces conditions, une surface très lisse agit comme un miroir radioélectrique et renvoie l’onde radar au loin, car on ne se voit dans un miroir que si l’on est devant lui (voir le schéma ci-dessus). Comme presque rien n’en revient vers le radar, les surfaces lisses apparaissent très sombres. Si le vent souffle à la surface de l’eau, des petites vagues, dites «capillaires», sont créées et constituent autant de petites facettes à la surface. Celle-ci apparaît alors brillante sur l’image radar pour deux raisons : d’une part, certaines de ces facettes peuvent être orientées face au radar, d’autre part, comme la longueur d’onde du radar est du même ordre de grandeur que la taille des vagues capillaires (quelques centimètres), celles-ci ne constituent pas un miroir aussi directif qu’une grande étendue lisse, à cause de la diffraction. Une partie significative de
l’énergie est donc renvoyée vers l’instrument même si l’orientation de la facette n’est pas optimale. Un vent de quelques kilomètres par heure suffit pour «exciter» ces vaguelettes, sauf si la mer est couverte d’une pellicule d’huile. L’expression «une mer d’huile» rend bien compte de la faible rugosité de la surface dans ces conditions. Cette pellicule peut être d’origine naturelle ou artificielle. Le phytoplancton répand de faibles quantités de matière organique à la surface de l’eau. Dès que la vitesse du vent atteint 15 à 20 kilomètres à l’heure, la surface devient rugueuse malgré cet apport de matière organique. Lorsque la pellicule est d’origine artificielle, en particulier si elle provient du nettoyage en mer (illégal) des cuves à mazout des navires, elle peut être plus épaisse et continuer à faire une mer d’huile même avec des vents significatifs. Enfin, lorsque les vents sont très violents, même des nappes de pétrole épaisses peuvent ne pas être vues par radar. Il suffit que de l’eau les recouvre en quantité suffisante pour que l’effet «mer d’huile» disparaisse. Ceci est d’autant plus facile pour les produits pétroliers dont la densité est proche de celle de l’eau (cas du pétrole de l’Erika, autre navire ayant provoqué une pollution importante).
LES VARIATIONS DU NIVEAU DE LA MER VUES PAR TOPEX-POSÉIDON
La mer monte à cause du réchauffement climatique
depuis le début des années 1990, les satellites altimétriques, en particulier Topex-Poséidon, j surveillent en permanence les variations du niveau de la mer, par rapport au centre de la Terre, avec une précision remarquable, meilleure que le millimètre par an. La grande nouveauté est qu’on peut à présent surveiller ce qui se passe en pleine mer et non plus seulement le long des côtes continentales ou au bord des îles océaniques, comme le font les marégraphes. Entre début 1993 et début 2004, le niveau moyen global de la mer s’est élevé de près de trois millimètres par an, valeur double de celle mesurée par les marégraphes au cours du XXe siècle (estimée à 1,5 ± 0,5 millimètre/an). Mais cette vitesse d’élévation est loin d’être uniforme : dans certaines régions, la mer a monté (jusqu’à trois centimètres par an), dans d’autres, elle a baissé (voir la carte page ci-contre, en haut).
L’élévation du niveau de la mer est une importante conséquence du réchauffement climatique observé au cours des décennies récentes. Les modèles d’évolution du climat prédisent que la température moyenne de la planète continuera de croître au cours des prochaines décennies, en réponse à l’augmentation de la concentration des gaz à effet de serre (dioxyde de carbone, méthane, vapeur d’eau) dans l’atmosphère terrestre. Ces modèles prédisent qu’à l’horizon 2100, le niveau moyen global de la mer sera plus haut qu’aujourd’hui d’environ 40 centimètres, mais avec toutefois une marge d’erreur importante de ± 30 centimètres. De plus, ces prévisions montrent toutes que l’élévation ne sera pas uniforme. La mer montera plus vite dans certaines régions que dans d’autres. Cependant, il subsiste encore d’importants désaccords entre les modèles et donc une grande incertitude quant aux régions les plus menacées.
Élévation du niveau moyen global de la mer mesurée par spatiale permet de cartographier la variabilité géographique Topex-Poséidon entre début 1993 et début 2004. C’est du taux d’élévation du niveau de la mer (voir figures grâce à sa couverture globale des océans que l’altimétrie page ci-contre).