Les niches du système solaire extérieur: Europe et Titan
Y a-t-il un océan sous la surface d’Europe? L’atmosphère de Titan est-elle favorable à l’émergence de la vie?
Quelles soient gazeuses comme Jupiter et Saturne, ou glacées comme Uranus et Neptune, les planètes géantes ne semblent guère hospitalières. Si elles possèdent une surface solide à la limite de leur noyau central, celui-ci doit se situer à un niveau de pression tel qu’il rend impossible toute forme de vie telle que nous la connaissons. On pourrait imaginer le développement d’une chimie prébiotique au niveau des nuages de méthane, d’ammoniac ou d’eau, à un niveau de pression de l’ordre du bar ou de quelques bars, à partir des hydrocarbures présents dans l’atmosphère. Mais si une telle chimie aboutissait à la formation de macromolécules, celles- ci, en l’absence de surface solide, sombreraient par gravité vers l’intérieur et seraient irrémédiablement détruites suite à l’augmentation de température et de pression.
Revenons donc aux objets dotés d’une surface solide, les satellites extérieurs. Deux d’entre eux attirent particulièrement l’attention : Europe, satellite galiléen en orbite autour de Jupiter, et Titan, le plus gros satellite de Saturne, entouré d’une atmosphère épaisse comparable à la Terre. Comme tous les satellites en orbite autour de Jupiter, Europe est dénué d’atmosphère stable. On sait en revanche, grâce aux mesures de spectroscopie infrarouge, que sa surface est recouverte de glace d’eau. La surprise est venue des premières images rapprochées de la surface, prises par la sonde Voyager 1 en 1979, confirmées quinze ans plus tard par celles de la sonde Galileo, en orbite autour du système jovien.
Elles ont mis en évidence un réseau complexe de structures linéaires qui s’entrecroisent. Les plaques qu’elles délimitent semblent s’être déplacées les unes par rapport aux autres sur un milieu visqueux voire liquide ; le meilleur candidat pour ce milieu est l’eau liquide, vraisemblablement salée. Cet océan souterrain serait aussi responsable du champ magnétique induit du satellite, découvert par la sonde Galileo : celui-ci serait produit par effet dynamo à l’intérieur du satellite.
Qui dit eau liquide dit, peut-être, milieu favorable à l’émergence de la vie… Tout le problème reste à évaluer l’épaisseur de la couche de glace qui surmonte cet éventuel océan : selon les modèles actuels, elle pourrait être d’au moins une dizaine de kilomètres, voire bien plus… Ensuite se poserait le grand défi: comment forer cette glace? Dans un premier temps, les scientifiques envisagent l’envoi d’un satellite en orbite autour d’Europe pour une mesure précise de son altimétrie et de son champ de gravité.
Dans l’environnement lointain du système de Saturne, le satellite Titan intrigue les astronomes depuis le début du XXe siècle, lorsque les observations de l’astronome Comas Sola mirent en évidence l’existence d’une atmosphère épaisse. Titan est le seul satellite du système solaire à présenter cette caractéristique. Les observations télescopiques, puis celles de la sonde Voyager 1 en 1981, ont montré que la surface de Titan était en permanence cachée sous une épaisse couche nuageuse, et que son atmosphère était constituée majoritairement d’azote moléculaire. On y a aussi trouvé du méthane, ainsi qu’un grand nombre de molécules hydrocarbonées et de nitriles, formées par la dissociation de CH4 et de N2. On y trouve donc les briques susceptibles de participer à la formation des molécules prébiotiques plus complexes.
L’atmosphère de Titan serait-elle un milieu favorable à l’émergence de la vie ? Elle présente cependant une différence capitale avec la Terre : sa très basse température doit considérablement ralentir toutes les réactions chimiques qui pourraient y intervenir. Titan n’en reste pas moins un objet fascinant, dont l’exploration est l’objectif premier de l’ambitieuse mission Cassini-Huygens. Le 14 janvier 2005, le module de descente Huygens s’est posé avec succès à la surface de Titan, et en a envoyé sur Terre les premières images, révélant la présence probable de nappes liquides d’hydrocarbures. L’orbiteur Cassini, quant à lui, a entrepris une exploration de plusieurs années de l’ensemble du système de Saturne.
Vidéo : Les « niches » du système solaire extérieur: Europe et Titan
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Les « niches » du système solaire extérieur: Europe et Titan