Vers le Soleil
Après son passage à proximité de la Terre, la luminosité et la largeur de la queue diminuèrent, comme on l’avait prévu. Mais après le 5 avril, quand la Lune ne perturba plus les observations, et jusqu’au 20 avril, quand la hauteur de la comète fut trop faible pour autoriser la poursuite des observations, on put encore voir un objet qui présentait une série de caractéristiques assez intrigantes et qui offrait, avec d’autres corps célestes, des configurations spectaculaires. Alors que la chevelure ne dépassait plus, les soirs les plus favorables, la magnitude 2,5, la longueur de la queue était au plus de 15° à l’œil nu, de 22° aux jumelles et de 25° sur les photographies les plus exposées.
Le 15 avril, la luminosité de la comète Hyaku-take fut nettement augmentée par un petit outburst, provoqué par l’expulsion soudaine de matière du noyau. Au télescope, on put observer que le faux noyau paraissait aplati comme une espèce de beignet, avec deux structures en forme d’ailes qui se ramifiaient en finissant dans la queue de poussières. Sur les photographies prises ce soir-là, la queue d’ions présentait une structure irrégulière, tordue et presque enroulée sur elle-même. À partir du 16 avril, la géométrie d’observation permit aussi de voir la queue de plasma et la queue de poussières, bien détachées. On put distinguer leur disposition assez suggestive, qui formait une espèce de «queue d’hirondelle», avec la queue de poussières à gauche et la queue d’ions, caractérisée par la présence de nombreux jets filiformes, à droite. La vision était particulièrement séduisante aux jumelles de 20 x 80 ; sur les photographies, on constatait que la queue était triple, puisque la queue d’ions apparaissait elle-même divisée en deux tronçons. Naturellement, la comète s’éloignant de plus en plus de la Terre, de plus en plus de la Terre, les dimensions réelles de sa queue augmentaient de soir en soir, puisqu’en se rapprochant du Soleil, l’astre subissait chaque jour davantage l’action du vent solaire. Vers le 20 avril, la queue de gaz ionisés avait atteint la taille de 50 millions de km. Il s’agit d’une valeur particulièrement élevée, surtout si l’on tient compte des dimensions réduites du noyau. À l’aide de l’antenne de 70 m de Goldstone, les spécialistes de la NASA réussirent, en utilisant la technique du radar, à mesurer pour la première fois avec précision depuis la Terre le diamètre du noyau d’une comète. Il fut établi que le noyau de la comète Hyakutake mesurait entre 1 et 3 km seulement, soit environ cinq fois moins que la comète de Halley. Pour expliquer comment cette comète fut en mesure de développer une telle activité, il est nécessaire d’admettre qu’un pourcentage important de sa surface (peut- être plus de 50 %) est actif, c’est-à-dire capable de réagir à l’action du Soleil (par comparaison, 10 % seulement du noyau de la comète de Halley est actif).
Une deuxième découverte importante fut effectuée par la sonde solaire SOHO. Observant la comète après son passage au périhélie (1er mai), quand elle n’était plus visible depuis la Terre, le coronographe de bord montra la présence d’une troisième queue, formée de poussières lourdes qui subissaient très peu la pression de la radiation solaire et qui tendaient ainsi à se répartir le long de l’orbite de l’astre. Mais la découverte la plus retentissante revint au satellite allemand ROSAT, qui capta pour la première fois des rayons X émis par une comète. Habituellement, les rayons X sont produits dans des circonstances extrêmement énergétiques, qui se retrouvent rarement dans le cas d’une comète. Par ailleurs, l’émission de la comète Hyakutake était très intense. L’explication la plus vraisemblable du phénomène est que le gaz entourant le noyau cométaire absorbe les rayons X du Soleil, puis les émet à nouveau par fluorescence (c’est le même phénomène qui, dans l’espace visible, fait briller la queue de plasma).